Infocom a ses racines au sein du Massachussets Institute of Technology, institution à partir de laquelle la compagnie fut fondée à travers la réunion de membres du personnel et d’étudiants, à l’initiative de Dave Lebling, Marc Blank, Albert Vezza, et Joel Berez.
Parmi ces derniers, Marc Blank et Dave Lebling avaient développé dès 1977 et dans le cadre du prestigieux laboratoire de science informatique du MIT un jeu d’aventures inspiré par Colossal Cave / Adventure (1972), le premier titre du genre. Ce jeu uniquement textuel —comme toutes les créations fonctionnant alors sur Mainframe— tournait sur le PDP-10 du laboratoire et pouvait bénéficier d’un système révolutionnaire de compression de texte qui permettait de contourner les limites imposée par la taille de la mémoire.
L’architecture de ce système reposait sur l’alliance entre un langage de programmation dédié, nommé ZIL (pour Zork Implementation / Interactive Language), et une machine virtuelle nommée Z-machine : ZIL permettait de compiler du texte interactif en un code compact, lequel pouvait fonctionner sur n’importe quel système équipé de la Z-machine. Cette trouvaille ingénieuse permettait aux programmeurs de s’affranchir (partiellement) du matériel : il n’était plus nécessaire d’adapter chaque jeu indépendamment des autres, mais il suffisait d’adapter la Z-machine sur laquelle fonctionnaient les jeux à de nouvelles architectures matérielles. En outre, l’interpréteur de syntaxe créé pour l’occasion permettait le traitement de phrases complexes en langage naturel (en Anglais), telles que : “Get everything that is on blue table except the small saw and the big hammer”, là où les autres interpréteurs se limitaient généralement à des phrases simples, du type verbe-complément d’objet.
Le jeu de Marc Blank et Dave Lebling devint éventuellement Zork I et fut commercialisé en 1980, d’abord pour les ordinateurs TRS-80, par Infocom, la société créée entre-temps par eux. Adapté ensuite sur de nombreux systèmes, Zork devint un best-seller international, notamment sur IBM PC.
Lebling et Blank développèrent ensuite plusieurs jeux en utilisant le même système, et ils durent faire appel à d’autres créateurs pour les implémenter sur la plupart des ordinateurs existants (dont Steve Meretzky) : Infocom développa et édita ainsi le reste de la série Zork, The Hitchhiker’s Guide to the Galaxy, basé sur l’œuvre de Douglas Adams, ou encore A Mind Forever Voyaging. Suivant l’évolution du marché, la Z-machine fut « portée » sur la plupart des plate-formes de l’époque : Apple II, Atari 400/800, IBM PC, Commodore 64, CP/M, Texas Instruments TI-99/4A, puis Amstrad CPC et PCW, Commodore Plus/4, Commodore 128, Apple Macintosh, Atari ST, ou encore Commodore Amiga.
Contrairement à la plupart des jeux vidéo, dont la « vie » commerciale était généralement courte, les titres d’Infocom continuèrent ainsi à bien se vendre pendant plusieurs années, principalement en raison de leur réputation de qualité. Un des facteurs de réussite d’Infocom fut également un marketing intriguant, reposant notamment sur un packaging soigné des produits. Ce dernier incluait une grande boîte cartonnée, facilement identifiable, une « affiche » différente pour chaque jeu, à la manière des affiches de cinéma (et servant d’illustration à la boîte), de luxueux manuels imprimés sur papier glacé, des indices imprimés à utiliser dans le jeu, et même, dans certains cas, des objets (surnommés feelies), utiles dans le jeu.
Cependant, l’apparition des jeux d’aventures graphiques (comme la série King’s Quest de Sierra Entertainment) —puis celle des aventures “point and click” (apparues avec Maniac Mansion, de Lucasfilm Games, en 1987)— drainèrent peu à peu les chances que l’éditeur avait d’accroître sa base de joueurs, sans toutefois éroder celle-ci.
En 1985, Infocom s’essaya au développement d’applications professionnelles en commercialisant un système de bases de données à destination des petites entreprises nommé Cornerstone, mais ce fut un demi-échec. En 1986, pour tenter de résoudre ses problèmes, la société fusionna avec Activision. Ce dernier éditeur, confronté à ses propres problèmes d’adaptation suite à un changement de direction, finit par fermer Infocom en 1989, non sans avoir essuyé auparavant d’importantes pertes financières.
Le nom Zork continua ensuite d’exister dans le catalogue d’Activision, à travers la réédition des principaux titres d’Infocom pendant les années 1990, et grâce au développement et à la commercialisation de quelques nouveaux jeux. La marque Infocom est aujourd’hui la propriété d’une société nommée Omni Consumer Products corporation.
1. Ludographie
- La série Zork :
- La trilogie originale de Marc Blank et Dave Lebling) :
- Zork I: The Great Underground Empire (1980)
- Zork II: The Wizard of Frobozz (1981)
- Zork III: The Dungeon Master (1982)
- La trilogie Enchanter :
- Enchanter (1983, Marc Blank et Dave Lebling)
- Sorcerer (1984, Steve Meretzky)
- Spellbreaker (1985, Dave Lebling)
- Beyond Zork: The Coconut of Quendor (1987, Brian Moriarty)
- Zork Zero: The Revenge of Megaboz (1988, Steve Meretzky)
- Zork: The Undiscovered Underground (1997, Michael Berlyn and Marc Blank)
- La trilogie originale de Marc Blank et Dave Lebling) :
- La série Planetfall :
- Planetfall (1983, Steve Meretzky)
- Stationfall (1987, Steve Meretzky)
- Deadline (1982, Marc Blank)
- Starcross (1982, Dave Lebling)
- Suspended: A Cryogenic Nightmare (1983, Michael Berlyn)
- Infidel (1983, Michael Berlyn)
- The Witness (1983, Stu Galley)
- Cutthroats (1984, Michael Berlyn & Jerry Wolper)
- The Hitchhiker’s Guide to the Galaxy (1984, Steve Meretzky & Douglas Adams)
- Seastalker (1984, Stu Galley & Jim Lawrence)
- Suspect (1984, Dave Lebling)
- A Mind Forever Voyaging (1985, Steve Meretzky)
- Wishbringer: The Magick Stone of Dreams (1985, Brian Moriarty)
- Ballyhoo (1986, Jeff O’Neill)
- Hollywood Hijinx (1986, "Hollywood" Dave Anderson)
- Leather Goddesses of Phobos (1986, Steve Meretzky)
- Moonmist (1986, Stu Galley & Jim Lawrence)
- Trinity (1986, Brian Moriarty)
- Border Zone (1987, Marc Blank)
- Bureaucracy (1987, Infocom & Douglas Adams)
- The Lurking Horror (1987, Dave Lebling)
- Nord and Bert Couldn’t Make Head or Tail of It (1987, Jeff O’Neill)
- Plundered Hearts (1987, Amy Briggs)
- Sherlock: The Riddle of the Crown Jewels (1988, Bob Bates)
- Arthur: The Quest for Excalibur (1989, Bob Bates)
- James Clavell’s Shogun (1989, Dave Lebling)
- Journey (1989, Marc Blank)
2. Référence
- “Interactive Text In An Animated Age: Infocom Faces The Challenge. A Conversation With Joel Berez And Marc Blank”, article paru dans le magazine Compute!, n° 92, janvier 1988.
- Site internet Infocom, The Master Storytellers
- Dossier “Down From the Top of Its Game. The Story of Infocom, Inc.”, sur le site du M.I.T.
- Infocom elsewhere, site offrant une galerie d’images complète des différentes versions des jeux d’infocom.
- Base de données Infocom Documentation Project, offrant une version numérique des manuels de jeux d'Infocom en téléchargement.