D’abord surnommée par ses développeurs Dural (1996), puis Blackbelt ou Katana (ces deux projets internes étant concurrents jusqu’en 1997), la console qui a finalement adopté le nom définitif Dreamcast (qu’on peut traduire en Français par l’expression « diffuseur de rêve ») est emblématique de l’époque : à l’extrême-fin des années 1990, les constructeurs de matériel dédié au jeu vidéo se livrent à une guerre impitoyable pour pouvoir offrir au plus grand nombre la machine la plus puissante, précipitant la venue de la Dreamcast, quatre ans seulement après la sortie de la Saturn. Dans le même temps, le marché historique des bornes d’arcade atteint son apogée : le matériel de la Saturn, directement inspiré des technologies de l’arcade avec ses nombreux composants, coûtait cher, trop cher pour que SEGA puisse s’imposer dans la course aux prix bas. Aux début des années 2000, avec la Dreamcast, le matériel des consoles sert de base à celui des bornes d’arcade (Naomi). Les éditeurs de jeux délaissent les plate-formes les moins répandues pour concentrer tous leurs efforts à séduire le grand public, quite à privilégier des titres populistes. Les budgets en communication et marketing s’envolent, pèsent d’une manière déterminante sur les choix stratégiques des acteurs du marché, ces derniers étant d’ailleurs soumis aux choix de leurs actionnaires. La combinaison de ces différents facteurs, ajoutée à des coûts de développement qui atteignent des sommets, explique à la fois l’incomparable succès de la PlayStation 2, plébiscitée par les médias de masse, et le retrait de SEGA du marché des consoles de jeux vidéo.
La Dreamcast est la dernière console de jeux du constructeur japonais, la société ayant été victime de la lutte avec la concurrence, principalement Nintendo et Sony. C’est en partie pour cette raison, mais surtout grâce au savoir-faire de la firme et grâce aux efforts exceptionnels dont la console bénéficia pour sa logithèque que la Dreamcast est aujourd’hui considérée par les joueurs avertis comme la meilleure machine de jeux de son époque (ce qui fait écho à sa baseline : “The ultimate gaming system”). Elle est également entrée dans l’histoire pour avoir été la première console de jeux vidéo avec un modem intégré : sa venue, incidemment, marque aussi les débuts difficiles de l’ère du jeu vidéo en ligne.
Comme toutes les consoles de jeux de sa génération, la Dreamcast a été produite en plusieurs versions, dont les trois principales se distinguent par la provenance des jeux qu’elles acceptent (« zone ») : de couleur blanche et compactes, elles sont d’apparence identique excepté pour ce qui est de leur logo (une spirale, de couleur orange/rouge sur les marchés NTSC américain et asiatique, et de couleur bleue pour le marché PAL européen). Leur emballage, celui des logiciels commercialisés, ou encore la connectique fournie avec permettent encore de les distinguer (les consoles vendues en France bénéficient de la meilleure sortie vidéo avec un connecteur Péritel RVB).
Plusieurs versions (ou éditions) de la Dreamcast, qui ont été fabriquées en série limitée ou en petite quantité, sont aujourd’hui particulièrement recherchées par les collectionneurs de matériel : il existe ainsi des Dreamcast de couleur noire (comme la R7), rose, verte ou bleue, à la coque matte, satinée (finition pearl), ou semi-translucide (dénommées skeleton, parce qu’elles laissent apercevoir leurs composants), déclinées en Dreamcast Hello Kitty, Sport ou Claire Redfield (l’héroïne de Resident Evil: Code Veronica)... La plus rare de toutes est la Dreamcast Gundam RX-78, fabriquée à 78 exemplaires seulement et vendue en direct uniquement au Japon en 1999.
Voici une liste des principales éditions de la Dreamcast : Standard PAL EUR (logo bleu) · Standard NTSC-J (logo rouge) · Standard NTSC-U (logo orange, white box, black box) · Biohazard: Code Veronica (Claire, Stars) · Christmas Seaman · Gundam RX-78 · Hello Kitty (Blue edition, Pink edition) · Holiday · Jet Set Radio · Limited Edition (Black, Pearl Blue, Pearl Pink, Silver) · Mazora (ou Maziora) · Regulation 7 (R#7) · Sakura Wars · Sega Sports · Sonic the Hedgehog 10th Anniversary · Toyota · Tsutaya · Divers 2000 CX-1 (sources : [1], [2])
Et quelques exemples :
Bien qu'elle ait été conçue et fabriquée avant la fin des années 90, il est remarquable que la console n'a que peu « vieilli » sur le plan technique.
Comme son aînée (la Saturn), elle est réputée offrir des conversions de jeux d’arcade « parfaites » : sa technologie pouvait pour ce faire s’appuyer sur celle des bornes produites par SEGA pour les professionnels. En outre, le constructeur a dû déployer des efforts inouïs pour soutenir sa machine, ceci afin de compenser son abandon (relatif) par les éditeurs tiers. Victime, notamment, du marketing agressif de Sony bien relayé par les médias à l’époque, mais aussi des conséquences financières de l’insuccès de son aînée, la Dreamcast a été boycottée par certains grands noms du jeu à sa sortie (Electronic Arts).
C’est justement soucieux de s’éloigner de l’une des raisons de l’insuccès de la Saturn (à savoir, la parfaite connaissance que cette dernière exigeait de ses développeurs), que les développeurs de SEGA avaient fait de la Dreamcast une console compatible Microsoft Windows CE, ce qui la rendait particulièrement simple à programmer et apte à recevoir des conversions rapides de jeux PC : au final, cet avantage lui permit surtout de bénéficier de nombreux développements amateurs, notamment d’émulateurs de consoles, souvent après la fin de sa vie officielle (survenue en mars 2001).
Moins gourmant, quoique plus difficile d’accès, son kit de développement maison lui vaut quelques productions originales inégalées de SEGA, parfois financées à perte : il en résulte des titres somptueux, tels que l’inachevé Shenmue de Yu Susuki, l’auteur d’Out Run (Shen Mue apparaît dans le Guinness Records Book comme le jeu qui a eu le développement le plus cher, soit 70 millions de dollars US) ou, dans une moindre mesure, comme les créations des concepteurs de Sonic (la Sonic Team).
Au Japon, le dernier jeu «officiel» commercialisé pour Dreamcast est sorti en 2007. Après avoir abandonné sa console, Sega se rapprocha de son côté de Nintendo et adapta certains de ses titres exclusifs pour GameCube, ou pour la XBox de Microsoft. Depuis, des adaptations de titres d’autres plateformes (non officielles / non autorisées), des jeux non terminés à l’époque et des titres homebrew ne cessent d’être publiés pour cette console : c’est le cas, par exemple, de titres sortis en arcade sur Sega Naomi ou sur Sammy Atomiswave (qui ont une architecture matérielle proche de celle de la console), ou encore de jeux Neo-Geo CD (grâce à l’émulateur Neo4All[3] pour Dreamcast).
Les contrôleurs de la Dreamcast, qui peuvent être jugés peu ergonomiques en raison de leur taille imposante, sont néanmoins soigneusement pensés : ils permettent par exemple d’effectuer un reset de la console (cette dernière ne possède d’ailleurs pas de bouton prévu à cet effet). Ils regroupent un contrôleur analogique, un pavé numérique, deux gachettes, et un ensemble de quatre boutons disposés en croix et pouvant également faire office de second pavé numérique. Leur design les place ainsi à mi-chemin entre les contrôleurs de cinquième génération (Nintendo 64) et les contrôleurs de la génération suivante, ces derniers se distinguant par la présence de deux contrôleurs analogiques. Cependant, ils acceptent jusqu’à deux unités secondaires enfichables : la première, nommée VM(U) (pour Visual Memory ou Visual Memory Unit aux États-Unis) sert à la fois de carte mémoire et de mini console de jeux grâce à un écran LCD. Un autre kit leur apporte la fonction «vibrante» (le Rumbling Pack, inspiré de la technologie DualShock introduite par Sony pour sa PlayStation). Enfin, des cartes mémoire existent.
Comme la plupart des consoles, la Dreamcast peut en outre être pourvue d’un pistolet, d’un micro, de maracas, et — ce qui est plus original — d’une souris et d’un clavier : ce dernier est utilisé pour naviguer sur Internet, pour jouer en ligne (Phantasy Star online), ou par l’étonnant remake de House of the Dead 2 : Typing of the Dead.
1. Jeux Dreamcast
Il est évidemment difficile et entièrement subjectif de sélectionner une liste d'une douzaine de jeux. Ceux qui suivent sont à notre avis emblématiques de la plate-forme, soit parce qu'ils tirent le meilleur parti technique de la console de Sega, soit parce qu'ils offrent une expérience de jeu remarquable, soit parce qu'ils ont marqué l'histoire du jeu vidéo.
2. Spécifications techniques
- Processeur (CPU) : Hitachi SH-4 de type RISC, contenant une unité de calcul vectoriel 128 bits (fréquence des opérations : 200 MHz 360 MIPS/1.4 GFLOPS)
- Moteur graphique (GPU) : PowerVR2 DC (capable de tracer plus de 7 millions de polygones par seconde) conçu par NEC/VideoLogic
- Mémoire : Principale 16 Mo, Vidéo 8 Mo, Sonore 2 Mo.
- Carte son : Processeur sonore 'Super Intelligent' de Yamaha, contenant un processeur ARM7 32 bits cadencée à 45 MHz (64 canaux stéréo PCM/ADPCM)
- GD-ROM Drive : Vitesse maximum 12x (lorsqu’il tourne a une vitesse angulaire constante mode-CAV). Le GD-ROM est un type de média d’une capacité de environ 1 Go (soit 112 minutes) spécialement développé par Yamaha.
- Modem : Modem 56 kbit/s de série sur la console (ou 33 kbit/s pour la version européenne/PAL) ; possibilité de remplacer le modem d’origine pour un Broadband Adapter (modem haut-débit ADSL).
- Couleurs : Affichage de 16,7 millions de couleurs simultanément
3. Liens et bibliographie
- Le précieux WIKI Sega Retro, en anglais (pour tout ce qui a trait à Sega) : https://segaretro.org/
- Le site guardiana.net, initialement consacré à la console 16-bits de SEGA (Mega Drive) fournit une base de données en Français des jeux sortis pour Dreamcast : http://www.guardiana.net/MDG-Database/Dreamcast/
- Le site Dreamcast Programming offre des ressources sur le matériel et pour la programmation sur Dreamcast : http://mc.pp.se/dc/
- Un article sur Hidezaku Yukawa, directeur de Sega au moment de la sortie de Dreamcast : http://www.giantbomb.com/hidekazu-yukawa/72-90306/